Ce document est rédigé par monsieur Lassad Habaeil

TEBOURSOUK, HERITIERE DE THIBURSICUM BURE

Téboursouk, héritière de l’antique Thibursicum Bure, fait partie du Haut Tell tunisien. Perchée à 500 m d’altitude, la ville est construite en amphithéâtre entre le Djebel Sidi Rahma, qui la domine à l’ouest, et l’oued Esswani, qui la défend à l’est. Elle se trouve à 100 km à l’ouest de la Capitale Tunis, à 7 km au nord est du site de Dougga et 120 km de Carthage.

De nombreux facteurs ont du être déterminants pour le choix du site et le développement de la ville : la fertilité du territoire qui l’entoure et sa pluviométrie, l’existence d’une source abondante au sein même de la ville ; la proximité des carrières d’un calcaire propre à la construction sur les flancs de djebel Sidi Rahma ; et surtout une position facile à défendre qui domine la vallée du Khalled.

 

I- L’ORIGINE DE LA VILLE

 

1) LE TOPONYME

Les sources littéraires et épigraphiques reproduisent le nom antique de Teboursouk sous deux formes : Thibursicum Bure et Thubursicum Bure. Quelle qu’en soit la transcription, l’origine du nom n’est pas latine.

V. Guérin avait proposé une origine phénicienne à Teboursouk. Le toponyme Thibursicum Bure lui paraît phénicien et il atteste l’origine reculée de la ville. Ch. Tissot n’avait rien proposé pour l’élément Thibursicum, mais il suggérait le rattachement du mot « Bure » au mot punique « bor » qui signifie « excavation dans le roc ».

Une autre thèse présentait « Bure » comme l’épithète de toute une région qui englobait Thimida Bure et Thigibba Bure. Ces villes surnommées « Bure », situées autour de Teboursouk, sont séparées par une distance qui ne dépasse pas quelques kilomètres. A. Merlin et L. Poinssot estimaient qu’il était difficile d’imaginer l’étendue de la région dite « Bure ». Le terme « Bure », ajouté aux trois villes permettrait de les distinguer d’autres villes ayant le même nom comme Thubursicum Numidarum (Algérie) ou Thimida Regia (identifiée à Sidi-Ali-el-Sedfini ; Tunisie).

D’autre part, une origine libyque semble devoir être envisagée. St. Gsell a constaté l’abondance des noms  commençant par « TH » comme Thabraca, Thagaste, Thamugadi. Ajoutant à ces exemples d’autres villes d’origines libyque comme Thugga, Thgibba… D’après lui, les lettres « TH » représentent peut être  «dans beaucoup de cas, le préfixe qui indique le féminin en berbère ».

Quelle serait donc l’origine de Thibursicum Bure ? Historiens et philologues doivent, dans l’état actuel des connaissances, reconnaître la difficulté de parvenir à une certitude absolue.

 

BLOGRAPHIE

-          Atlas Archéologique de Tunisie, f. XXXIII, n° 28.

-          V. Guérin, Voyage archéologique dans la régence de Tunis, Paris 0865, t II, p. 119.

-          Ch. Tissot, Géographie comparée de la province romaine d’Afrique, t II, Paris 1888, p. 344.

-          A ; Merlin et L. Poinssot, Une nouvelle inscription de Teboursouk, Mémoires. Soc. Nat. Ant. France. 1913, p. 109- 158.

-          St Gsell, Histoire ancienne de l’Afrique du Nord, Paris 1913, t I, p. 317.

 

2) THIBURSICUM BURE A TRAVERS LES SOURCES LITTERAIRES LES TEXTES EPIGRAPHIQUES

 

Ptolémée cite une ville nommée Thubursicca. Elle est située sur le territoire de la  « Nouvelle Numidie ». En s’appuyant sur l’épigraphie, A. Merlin et L. Poinssot ont constaté que le passage de Ptolémée ne peut s’appliquer qu’à Thubursicum Numidarum (Khmissa, en Algérie). Les textes épigraphiques reproduisent le nom de Teboursouk sous deux formes : Thibursicum et Thubursicum. Ce dernier n’est attesté sur les inscriptions qu’à partir de la fin du III ème siècle de l’ère chrétienne. En datant les inscriptions portant le nom de Teboursouk, A. Merlin et L . Poinssot ont remarqué qu’ « à l’époque de Ptolémée et jusqu’à la fin du III ème siècle, Teboursouk n’est connu que sous le nom de Thibursicum ; Khmissa n’a jamais porté dans les nombreux textes qui, depuis le règne de Trajan, la mentionnent, que le nom de Thubursicum ». Par conséquent, la Thubursicca de Ptolémée ne peut s’appliquer qu’à Thubursicum Numidarum (Khmissa ; en Algérie). 

Le Corpus Inscriptionum Latinarum VIII à successivement reconnu dans la Thubursicca de Ptolémée Thibursicum Bure (CIL, VIII, p. 117) et Thubursicum Numidarum (CIL, VIII, p. 1473).

Par ailleurs, les informations relatives à Teboursouk se réduisent à une brève mention dans l’œuvre de Saint Augustin. Il s’agit de Servus, l’évêque catholique de Thibursicum Bure qui intenta un procès auprès du Proconsul, à Carthage, en vue de récupérer un terrain détenu par des « Donatistes » (représentants de la nouvelle Eglise d’Afrique) en 403- 404 de l’ère chrétienne. Molesté gravement par ces «schismatiques », Servus s’installa avec d’autres victimes Italie en 404 de l’ère chrétienne.

Les procès-verbaux de la conférence tenue à Carthage en 411 font quelques allusions à notre ville. Servus, l’évêque catholique en 404 (N° 31 sur la liste de son Eglise), assista à la conférence. Les actes l’appellent : episcopus plebis Thubursicensisbure. Il avait eu pour adversaire l’évêque donatiste Donatus (N° 31 sur la liste de l’Eglise rivale). Les actes l’appellent : episcopus civitatis Thubursicensisbure.

L’ethnique « Thubursicensis » va connaître une transformation ; les actes du Concile réuni à Carthage en 525 de l’ère chrétienne citent Reparatus comme episcopus plebis Thubursicuburensis. Les deux mots qui constituent le nom de la ville ont été liés et l’adjectif «ensis » ajouté au second d’entre eux.

Le dossier des documents épigraphiques et Littéraires est tout à fait muet quant aux origines de Teboursouk. Les sources littéraires n’offrent q’une documentation bien maigre sur l’histoire ancienne de la ville. Elles restent bien loin de satisfaire notre curiosité.

 

BIBLIOGRAPHIE

-          PTOLEMEE, IV, éd. Mûller.

-          Saint Augustin, Contra Gresconium, III. 43, 47.

-          P. Monceaux, Histoire littéraire de l’Afrique Chrétienne, Paris, 1912, p. 293.

-          P. J. Mesange, L’Afrique chrétienne, Paris, 1912, p. 155-156.

-          Corpus Inscriptionum Latinarum, VIII. Berlin, 1881- 1916 (CIL VIII)

-          A. Merlin et L. Poinssot, Une nouvelle inscription de Teboursouk, Mémoire. Soc. Nat. France 1913, p. 109- 158.

-          M. Fantar, Téboursouk, stèles anépigraphiques et stèles à inscriptions néopuniques. Mém. présenté à l’Académie des Ins. et Belles lettres. 16, 1974.

 

II- TEBOURSOUK : FRAGMENTS D’HISTOIRE

(IIe SIECLE AV. J-C – VII SIECLE AP. J-C)

 

A l’origine, cité d’origine numide, la ville se trouve sur les territoires conquis par Carthage depuis une date mal connu et conservée par elle jusqu’au milieu du deuxième siècle av. J-C. Après la défaite de Carthage en 146 av. J-C,  suite à la troisième guerre punique, Teboursouk et sa région fut reconquise par le roi numide Massinissa. A l’Est de notre ville, sur les crêtes de Djebel Echid, passaient les frontières qui séparaient le royaume numide de la nouvelle province (Provincia Africa), créée par Rome sur les terres de Carthage après sa destruction. Ces frontières nommées « Fossa Regia » fut l’œuvre du  Scipion Emilien. Située à l’est de la Fossa Regia, c'est-à-dire à l’extérieur de la province romaine, la ville resta indépendante jusqu’à la fin de la guerre civile en 46 av. J-C, lorsque César supprima le royaume numide et créa la Provincia Nova à partir des terres du roi Juba Ier, allié de Pompée.

A partir de cette date et suite au règlement des affaires africaines par César, Thibursicum Bure devint sujette de Rome.  Après avoir subi une romanisation dont on ignore le rythme et la profondeur, la ville changea de statut juridique au début du troisième siècle ap. J-C, sous le règne conjoint de Septime Sévère et de Caracalla (198- 211 ap. J-C). Elle accéda au statut de municipe romain après la fusion de la cité indigène, dite « pérégrine », et du Pagus, constitué de citoyens romains en 205 ap. J-C. Sous le règne de l’empereur Gallien (261- 268 ap.J-C), la ville accéda à un nouveau titre honorifique. Elle devint Colonia.

En octobre 439, l’occupation de Carthage et la conquête de l’Afrique par le roi vandale Genséric marqua la fin de la présence romaine en Afrique. Durant le siècle vandale, Teboursouk s’entoure de silence. Après la défaite vandale et la reconquête d’une partie de l’Afrique par l’empereur byzantin Justinien en 533- 534 ap. J-C, Thomas (préfet du prétoire) décida la construction d’une citadelle à Thibursicum Bure sous le règne de Justin II, entre 572 et 574 ap. J-C. Cette fortification a abrité la ville médiévale après la défaite des byzantins et les débuts de la présence arabe en Afrique à partir du VIIème siècle de l’ère chrétienne.

 

Sources :

- Benabou (M.), La résistance africaine à la romanisation, Paris, 1976.

- Camps (G.), Monuments et rites funéraires protohistoriques, Paris, 1961

- Courtois (Ch.), Les Vandales et l’Afrique, Paris, 1896.

- Decret (F.) et Fantar (M.), L’Afrique du Nord dans l’Antiquité, Paris, 1981.

- Diehl (Ch.), L’Afrique Byzantine, Paris, 1986.

- Fevrier (P. A.), Approches du Maghreb romain, 2 tomes, Aix-en- Provence, 1989.

- Gascou (J.), La politique de l’empire romain en Afrique proconsulaire de Trajan à Septime Sévère, Rome, 1972.

- Gsell (St.), Histoire ancienne de l’Afrique du Nord, Paris, 1913.

- Julien (Ch.), L’histoire de l’Afrique du Nord, Paris, 1951.

- Lepelley (Cl.), Les cités de l’Afrique romaine au Bas- Empire, 2 tomes, Paris, 1981.

- Monchicourt (Ch.), La région du Haut-Tell en Tunisie, Paris, 1913.

- Picard (G. Ch), La civilisation de l’Afrique romaine.

 

 

 

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Commentaires (9)

1. SLIM 05/05/2008

BRAVO LASSAD POUR CE TRAVAIL
J'espere que tes traveaux seron publies prochainement

2. hebail ouafa 31/07/2008

merci cousin pour cet article.
je suis nostalgique à cette petite perle qui est TEBOURSOUK, ville natale de mes parents.

3. chihi abdelhamid 05/07/2009

j'ai une question et j'aime avoir une reponse si c'est possible.
pourquoi TEBOURSOUK avait tant d'importance durant la période coloniale sur le plan administrative la majorité des responsables coloniaux siègent de teboursouk .Et si c'est possible j'aime connaitre l'organisation administrative implanté a teboursouk sous le protectorat et merci

4. fethi chihi 01/09/2009

merci lassad pour ce document si riche qui peut aider nos élèves dans leur recherches. Un grand salut à toi, à F.à HAROUN et ton nouveau petit

5. wafa 04/02/2010

c n'est pas quelque chose de nouveaux pour vous je suis vraiment trés fier de vous merci

6. Jouini Amara 25/10/2010

C'est un bon travail qui vient d'un bon chercheur sur l'histoire de notre ville Téboursouk je t'encourage Mr LASSAD.Mais pourquoi pas faire une comparaison sur la population de Téboursouk d'avant et de maintenant et chercher les racines de la migration de cette population.
regardant un peut vers le passé comment elle etait attirante pour les peuples mais maintenant on voit pas cette attraction...

7. Abdelkader L'AHBAIEL 23/01/2011

Salut
je viens de decouvrire ce site c'est bien, mais depuis longtemps n'est pa smis à jour.
j'espére connaitre le fondateur que je le félicite pour ce travail comme je remerci mon cousin Lassâad L'AHBAIEL pour cet article formidable.

Bravos à tous

8. Rym KEFI 10/03/2011

EXCELLENT TRAVAIL LASSED ET CA M4ETONNE PAS DE TA PART

9. BEN ACHOUR MONCEF 04/06/2011

travail accademique methodique et trés bien argumenté. doit etre publié le +tot possible cc"est ce genre de travaux qui mérite l'encouragement de la part du ministère de la culture et non "fan et nagham surra 3aryana &couret kadem" tres honorable lassed tu fais honneur à bechir et àtout les HBAIEL .va de l'avant c'est un excellent debut ne t'arretes pas tu as l'envergure d'un vrai chercheur d'un vrais Ecrivain . P S:ton travail me rappelle la sage femme qui porte le mm nom;et qui etait MAITRE dans son ART pendant trois quart d'un siecle qu'elle repose en PAIX et que le paradis celeste soit sa demeure eternelle. personne je dis bien personne ne l'a remplacée.

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